Les pays méditerranéens s’accordent sur des mesures pour lutter contre le risque d’invasion par des espèces exotiques via les eaux de ballast et les sédiments des navires – 01/06/2010

Athènes/Malte, le 10 juin 2010 – Les représentants de 18 Parties Contractantes à la Convention de Barcelone se sont mis d’accord sur huit priorités stratégiques pour faire face au problème des eaux de ballast des navires et des espèces envahissantes en Méditerranée[1], ainsi que sur des mesures à prendre au niveau national, sous-régional ou régional pour mettre en œuvre ces priorités stratégiques.

«La Mer Méditerranée est l’une des principales zones maritimes au monde, avec plus de 300,000 escales portuaires par an et plus de 10,000 navires transitant par cette route très fréquentée chaque année. Les rejets d’eaux de ballast des navires peuvent avoir un impact négatif sur l’environnement marin», a déclaré Frédéric Hébert, Directeur du REMPEC – le Centre Régional Méditerranéen pour l’Intervention d’Urgence contre la Pollution Marine Accidentelle du PNUE/PAM[2].

« Les grands tankers et les transporteurs de marchandises sèches, que l’on retrouve couramment en Méditerranée, utilisent d’importantes quantités d’eaux de ballast. Celles-ci sont souvent pompées dans les eaux côtières d’une région après rejet des eaux usées ou déchargement de la cargaison du bateau, et sont ensuite rejetées à l’escale suivante, lorsqu’une autre cargaison est chargée. »

Des centaines d’organismes sont ainsi transportés dans les eaux de ballast, tels que plantes, animaux,  virus et bactéries. Des espèces exotiques nuisibles en font souvent partie et peuvent provoquer d’importants dommages écologiques et économiques aux écosystèmes aquatiques – elles sont souvent appelées espèces exogènes ou envahissantes.

Les espèces exogènes envahissantes ont un grave impact économique, environnemental et sanitaire ; elles sont aujourd’hui reconnues comme l’une des menaces les plus importantes sur la biodiversité au niveau mondial. Dans le cas des milieus marins et côtiers, les espèces invasives ont été identifiées comme l’une des quatre principales menaces pour les océans.

En particulier, elles peuvent avoir un impact économique sur les pêcheries en colonisant ou en tuant les poissons et d’autres espèces, sur le tourisme (méduses), en endommageant des installations, en se développant sur les bouées, les navires, les cordes et les habitats servant à l’aquaculture. Elles peuvent egalemant avoir un impact négatif sur les écosystèmes, en se positionnant en compétiteurs des espèces natives de la Méditerranée pour ce qui est des la nourriture et des espaces, et en modifiant les habitats.

D’autres peuvent avoir un impact sur la santé en raison de leur toxicité. C’est le cas de la micro-algue Alexandriom acatanella, à l’origine des phénomènes de « marées rouges », en raison de la production de toxines de type phycotoxines paralysantes (IPP) pouvant affecter les humains, mais aussi d’autres mammifères, les poissons et les oiseaux. Cette micro-algue est responsable de nombreuses maladies et de décès chez l’homme, suite à la consommation de fruits de mer infectés.

« Les eaux de ballast des navires constituent un problème particulièrement inquiétant en raison de leur rôle de vecteur d’introduction d’espèces exotiques envahissantes en Méditerranée », a déclaré Maria Luisa Silva, Officier-en Charge du Plan d’Action pour la Méditerranéen du PNUE. « Des études montrent que l’écosystème marin et les ressources de la Méditerranée ont été et continuent d’être gravement menacés par les espèces envahissantes ; le risque de nouvelles invasions s’intensifie même en raison de l’augmentation du trafic maritime. Les scientifiques estiment que le taux d’invasions biologiques en Méditerranée est d’une nouvelle espèce introduite tous les neuf jours »[3].
Rassemblés au début du mois, les représentants des pays ont discuté d’une stratégie méditerranéenne s’attaquant au problème des espèces exotiques. Ils se sont mis d’accord sur un ensemble de huit priorités, visant à atteindre une approche régionale harmonisée sur la gestion et le contrôle des eaux de ballast des navires.

Les pays ont également appuyé une proposition concernant des dispositions volontaires et temporaires pour le renouvellement des eaux de ballast des navires en Méditerranée, comme indiqué par la Convention Internationale pour le Contrôle et la Gestion des Eaux de Ballast et Sédiments des Navires[4].

Les délégations des pays ont considéré que la Convention n’étant encore pas en vigueur, de telles mesures, qui seront appliquées à titre volontaire, étaient nécessaires pour engager des actions et faire face au problème en Méditerranée.

De plus, les délégations ont unanimement convenu qu’une notification de ces dispositions temporaires et volontaires devait être envoyée à l’Organisme Maritime International (OMI) avant la prochaine Réunion des Parties Contractantes à la Convention de Barcelone, qui est prévue pour Novembre 2011. Les représentants des pays ont par conséquent demandé au REMPEC de faciliter ce processus en contactant officiellement les Parties Contractantes à la Convention de Barcelone.

[1] Ont assisté à la réunion d’Istanbul (1-3 juin) des délégations d’Albanie, d’Algérie, de Croatie de Chypre, de la Communauté Européenne, de l’Egypte, de l’Espagne, de la Grèce, d’Israël, d’Italie, de Libye, de Malte, de Monaco, du Monténégro, du Maroc, de la République Arabique de Syrie, de Tunisie et de Turquie. Des observateurs du Réseau Océanographique Opérationnel Méditerranéen (MOON), de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), et de l’Institut Océanographique International (IOI) ont également participé à la réunion.

Le document sur la Stratégie discuté pendant la réunion est le résultat du travail du Groupe d’Etude régional Méditerranéen et de ses sous-groupes thématiques, établis en septembre 2008 avec pour mandat de développer un Plan d’Action Stratégique pour la région.

Le groupe d’Etude est composé de l’ensemble des Parties Contractantes à la Convention de Barcelone, et est assistée dans son travail par les Organisations appropriées, à savoir l’Organisation Maritime Internationale (OMI - GloBallast), le Centre Régional Méditerranéen pour l’Intervention d’Urgence contre la Pollution Marine Accidentelle (REMPEC), agissant en tant que Secrétariat, et le Centre d’Activités Régionales pour les Aires Spécialement Protégées (CAR/ASP), associé aux aspects scientifiques du processus.

Le document inclus également un calendrier fixant des objectifs datés pour la mise en œuvre de la Stratégie et du Plan d’Action.

[2] Basé à Malte, le REMPEC assiste les pays côtiers Méditerranéens à développer la prévention et les moyens de lutte nécessaires en cas d’incident de pollution marine majeur. Le Centre facilite également la coopération entre pays, pour combattre la pollution marine accidentelle due à divers substances nocives dont le pétrole.

Le REMPEC est géré sous l’égide conjointe du Plan d’Action pour la Méditerranée du PNUE (PNUE/PAM) par l’Organisation Maritime Internationale (OMI).

[3] A. Zenetos, E. Meriç, M. Verlaque, P. Galli, C. F. Boudouresque, A. Giangrande, M. E. Çınar and M. Bilecenoğlu (2008), Mediterranean Marine Science 9/1, 119-165. 903 espèces exotiques ont été recensées jusqu’en avril 2008, dans le bassin méditerranéen, selon la littérature.

[4] En conformité avec la Règle B-4 de la Convention Internationale pour le Contrôle et la Gestion des Eaux de Ballast et Sédiments des Navires (en anglais).